
Robertine Barry grandit dans une famille assez aisée du Bas-Saint-Laurent. Après des études élémentaires aux Escoumins, puis au couvent de Trois-Pistoles, elle est pensionnaire au couvent des
Ursulines de Québec, de 1880 à 1882. C’est là qu’elle s’initie au journalisme en publiant ses premiers textes dans le journal étudiant
L’Écho du cloître.
En 1891, elle s’établit à Montréal avec une partie de sa famille, après la mort de son père. Elle est engagée à [modalien=synthese col, 106]La Patrie[/modalien] et devient la première femme de son équipe de rédaction. Ses premiers articles portent sur l’éducation, une cause qui lui tiendra à cœur tout au long de sa vie.
Honoré Beaugrand, le directeur du journal, lui offre ensuite de tenir une rubrique hebdomadaire intitulée
Chronique du lundi. Cette rubrique est publiée du 21 septembre 1891 au 5 mars 1900. Elle collabore aussi à la page féminine du journal,
Le coin de Fanchette, qui est considérée comme le premier véritable courrier du cœur au Québec.
Après un séjour de six mois à Paris, où elle participe à l’
Exposition universelle de 1900 comme représentante des Canadiennes, et une maladie qui la force à une longue convalescence, elle décide de réorienter sa carrière en lançant son propre périodique, le
Journal de Françoise, une revue bimensuelle qui paraît du 29 mars 1902 au 15 avril 1909. Dans son magazine, elle offre des rubriques variées (santé, arts, lettres, culture, etc.) et des textes littéraires signés par des écrivains et des écrivaines.
En 1904, Robertine Barry reçoit le titre d’officier d’Académie décerné par la France en reconnaissance de sa contribution à la promotion de la culture française. La même année, elle se rend à la Foire universelle de Saint-Louis en compagnie de quinze autres femmes journalistes canadiennes. Elles fondent ensemble le
Canadian Women’s Press Club et Robertine Barry en est élue vice-présidente. Elle préside également l’
Association des femmes journalistes canadiennes-françaises. En 1906, elle est déléguée du Canada à l’Exposition universelle de Milan. En 1907, elle fait partie du comité de fondation de la
Fédération nationale Saint-Jean-Baptiste, considérée comme la première association féministe canadienne-française. Elle est ensuite fonctionnaire, mais décède prématurément en 1910.
Si elle n’est pas, à proprement parler, la première femme journaliste au Québec, comme on la présente parfois, Robertine Barry est néanmoins la première femme à vivre de ce métier, d’abord comme pigiste, puis comme membre de la salle de rédaction de
La Patrie, enfin en éditant son propre magazine.
Robertine Barry s’illustre aussi par son engagement social et par son féminisme. Toute sa vie, elle réclame plus de droits pour les femmes, dont celui de s’instruire et de participer à la vie civique, ainsi que de meilleures conditions de vie et de travail pour les moins nantis de la société.
Robertine Barry a été désignée personnage historique le 8 mars 2021. Ce personnage historique est désigné pour les motifs suivants:
« Figure de proue du féminisme du tournant du XXe siècle, Robertine Barry est réputée pour être la première femme à vivre du métier de journaliste au Québec. Elle fait ses premières armes dans ce domaine en collaborant au journal étudiant du couvent des
Ursulines de Québec. Après avoir publié quelques articles et contes dans les pages du journal libéral
La Patrie, elle est engagée en 1891 par le directeur
Honoré Beaugrand pour rédiger une chronique hebdomadaire. Signée sous le pseudonyme de Françoise, cette «
Chronique du lundi » paraît du 21 septembre 1891 au 5 mars 1900. Robertine Barry connaît beaucoup de succès grâce à ses chroniques et à ses autres articles. Devenue une personnalité en vue, elle est fréquemment sollicitée pour donner des conférences. En 1899, elle est d'ailleurs la première femme conférencière invitée de l'
Institut canadien de Québec. L'année suivante, elle est nommée représentante des Canadiennes à l'
Exposition universelle de Paris et participe alors au
Congrès international des femmes. Elle collabore activement à la création de la
Canadian Women's Press Club en 1904 et à la fondation de la première association féministe canadienne-française, la
Fédération nationale Saint-Jean-Baptiste, en 1907. Elle est aussi la fondatrice du
Journal de Françoise, une revue bimensuelle publiée de 1902 à 1909. Défiant les idées reçues, elle a entre autres réclamé, pendant toute sa vie, davantage de droits pour les femmes, dont celui de s'instruire et de participer à la vie civique, et de meilleures conditions de vie et de travail pour les moins nantis de la société. De 1984 à 2000, l'Institut canadien de recherches sur les femmes a décerné chaque année le prix Robertine-Barry pour récompenser le meilleur article portant sur la condition féminine. »
Après sept ans de publication, le 15 avril 1909, Robertine met fin à la parution du Journal de Françoise, devenu un gouffre financier. Sans doute parce qu’elle a souvent cherché à améliorer le sort des travailleuses, Lomer Gouin, premier ministre du Québec, la nomme inspectrice du travail des femmes dans les manufactures. Mais ce travail ne la comble pas. La dépression la guette et son médecin lui conseille de voyager. Elle part à Paris où elle a de nombreux amis, dont des femmes et des hommes illustres. Quand elle revient à Montréal, elle ne va pas mieux. La cause de sa mort quelques mois plus tard est attribuée à une congestion cérébrale. Elle n’a que 46 ans, mais sa vie a été fort remplie.
Robertine Barry est enterrée dans la section R du cimetière Notre-Dame-des-Neiges de Montréal. Sa tombe, non marquée, est aujourd’hui recouverte par les herbes. Pas même une petite croix n’indique la présence de la sépulture de cette pionnière du journalisme féminin. Un vide qui reflète l’oubli où elle a sombré.
- Encyclopédie canadienne